Sainte Jeanne-Antide Thouret , 1765 – 1826
Publié le 10 Novembre 2023
Sainte Jeanne-Antide Thouret , 1765 – 1826
Chanoine Trochu, Emmanuelle Vitte, 1934
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Fille de la terre, d’un milieu aisé, elle nourrit sa vocation en gardant les troupeaux qui lui permettent de contempler la création. A son père qui veut la marier, elle répond : « Je ne soupire qu’après l’heureux moment où je pourrai me retirer dans un ordre religieux. Oh ! Non pas, croyez le bien, pour fuir la peine et la souffrance, mais pour apprendre à bien souffrir, car, si l’on souffre en religion, on a plus de force, grâce à la prière et aux bons exemples, que dans le monde. »
En 1787, elle entre chez les Filles de la charité pour s’occuper des malades et des pauvres. Mais la révolution est là avec, en 1791, la constitution civile du clergé ; Jeanne-Antide ne peut ni ne veut y souscrire. Très vite, puisqu’elle s’occupe des pauvres et pratique la charité, elle doit se cacher tout en poursuivant sa tâche à Besançon puis à Sancey, son village natal, où elle aide, nourrit, cache les prêtres réfractaires ; elle ouvre même une petite école avec sa jeune sœur. Dénoncée, elle doit fuir et s’exiler (1795-96) ; 2 années d’errance en Suisse puis en Bavière et en Autriche.
En 1797, un semblant de paix religieuse l’amène à rentrer, seule et sans moyens, à Sancey, sur l’ordre du vicaire général de Besançon (en exil) « pour continuer à se rendre utile aux malades et à la jeunesse ».
Malgré la persécution jacobine, elle fonde une école non déclarée à Besançon accompagnée de 5 jeunes filles (dont Anne-Marie Javouhey) et développe une aide aux pauvres, tout cela sans moyens ni soutien temporel. Les Bisontins nomment cette petite communauté « les sœurs du bouillon et des petites écoles ».
La paix religieuse arrive enfin en 1799 ; Jeanne-Antide peut dès lors donner toute sa mesure. Les ‘vocations’ affluent, l’autorité civile leur confie notamment la prison de Bellevaux (1802), un véritable cloaque, tenu jusque-là par des fonctionnaires corrompus, que les ‘sœurs’ assainissent par la douceur, le travail et la mise en place de règles de vie strictes. De tels succès suscitent des jalousies et Jeanne-Antide est l’objet de calomnies complaisamment répandues (de 1803 à 1806) par certains membres du clergé en vue de l’écarter de la congrégation naissante. Enfin, en 1807, l’archevêque approuve la règle des « sœurs de la charité de Besançon ».
Dès lors, les fondations se multiplient ; plusieurs diocèses demandent des sœurs et en 1810, le royaume de Naples leur propose de s’y implanter. Jeanne-Antide demeure jusqu’en 1819 en Italie pour asseoir les nouvelles communautés. C’est un grand succès à tel point que Pie VII érige la jeune congrégation en congrégation pontificale sous l’appellation de « Filles de la charité sous la protection de saint Vincent de Paul ». Jeanne-Antide en est la supérieure générale.
De retour en France, elle se heurte à l’archevêque de Besançon, de tendance gallicane, qui refuse les modifications (anodines) des constitutions et interdit à Jeanne-Antide de visiter les maisons de son diocèse sous prétexte qu’elle a créé un nouvel institut. Elle ne reverra jamais ses fondations premières ; malgré le soutien du nonce et de Rome, Mgr de Pressigny demeure inflexible. Crucifiée par cette mesure, elle garde sa sérénité et écrit à l’évêque : « c’est Dieu qui permet que ses serviteurs soient éprouvés, et il fait finir l ‘épreuve quand il lui plaît. J’attends l’heure de sa Providence, et je vous assure, monseigneur, que je reste dans la paix et la tranquillité la plus parfaite. »
Forte de sa Foi, ouvrière infatigable de la charité, à l’imitation de son maître saint Vincent de Paul, fidèle à la devise de sa congrégation « crux sola salus » (le salut n’est que dans la croix), elle meurt en 1826 à Naples.
Déclarée vénérable par Léon XIII en 1893, elle est canonisée en 1934 par Pie XI. A cette date, la congrégation compte 7500 religieuses dans 997 fondations, 182 diocèses et 6 pays. Les Sœurs de la charité de Besançon retrouvent leur congrégation d’origine en cette même année, avec la bénédiction de l’archevêque de Besançon, Mgr Binet. G.G.