Jérôme Lejeune 1927-1994 (2ème partie)
Publié le 31 Octobre 2020
Jérôme Lejeune 1927-1994 (2e partie)
Anne Bernet, Presses de la Renaissance, 2018, 510 pages
La notoriété acquise au début des années soixante suite à la mise en évidence du patrimoine génétique et à la découverte de la "trisomie 21" va très vite s'accompagner de graves désillusions.
En effet, diverses conversations informelles entendues ici ou là, dans les couloirs de l'ONU où il intervient lui font percevoir la tendance officielle qui se fait jour : les anomalies peuvent dorénavant être détectées en cours de grossesse ; leur remède de plus en plus admis est l'avortement ; sous couvert de "miséricorde", bien sûr. C'est revenir au programme eugénique des années 30 fondé sur le même argument faussement charitable.
Jérôme s'insurge. En septembre 1969, dans un discours à l'ONU, il démontre scientifiquement que, dès sa conception, le petit d'homme possède son message chromosomique unique ; en conséquence, tout avortement tue un être humain. Le discours est accueilli dans un silence glacé; on s'écarte, les amis se font rares; "aujourd'hui, j'ai perdu mon nobel de médecine" écrit-il à sa femme.
Cette position des scientifiques, Jérôme le sait, va vite se répandre dans le monde entier à l'encontre de la mission du médecin et de son serment.
Dès lors et pendant toute la décennie 1970, Jérôme s'efforce de lutter sur tous les fronts, particulièrement médiatiques, pour retarder le plus possible ce qu'il sait être inéluctable : il engage une lutte sans merci de la vérité contre la facilité, le mensonge et la volonté mortifère. En effet, au cours d'un débat en 1973, une femme demeurant anonyme déclare avec autorité: "Nous voulons détruire la civilisation judéo-chrétienne. Pour la détruire, nous devons détruire la famille, nous devons l'attaquer par son maillon le plus faible, l'enfant à naître." La lutte est d'autant plus âpre que Jérôme est isolé : beaucoup de ses amis l'abandonnent ; le clergé se fait silencieux voir, parfois, hostile.
Et pourtant, malgré la loi du silence, le professeur Lejeune, redoutable débatteur, arrive à s'imposer dans les médias ; fin 1974, Paul VI l'appelle à l'académie pontificale des sciences.
La loi passe en 1974 à titre provisoire; elle sera confirmée en 1979. Le professeur s'acharne par la création de "Laissez les vivre" et de "SOS futures mères". Il devient vraiment indispensable pour les tenants de la « culture de mort » (Jean-Paul II) de faire taire cet importun : on lui coupe ses crédits de recherche en 1981, les associations de défense de la vie sont l'objet de tentatives de noyautages ; mais rien n'y fait, Jérôme continue la lutte jusqu'au bout ; et, petite revanche de la vérité, il est élu à l'académie des sciences morales et politiques en 1982 et à l'académie de médecine en 1984.
En 1993, quelques semaines avant sa mort, Jean Paul II le nomme
président de l'académie pontificale pour la vie qu'il vient de créer.
Jérôme entre dans la vie éternelle au matin du jour de Pâques 1994. Beaucoup espéraient que son message s'éteindrait avec lui. C'était sans compter son épouse Birthe qui va permettre la poursuite des travaux du professeur grâce à la création de la "Fondation Jérôme Lejeune".
Si le grain ne meure....