Le sujet du mois : Vive le jeûne !
Publié le 4 Février 2018
Le sujet du mois : Vive le jeûne !
Par l’Abbé Pinilla, paru dans Zélie n°6, fev 2016
Le temps du Carême ramène pour nous ses œuvres caractéristiques que sont le jeûne, la prière et l’aumône (cf. Mt 6, 1-18). Nous comprenons assez facilement pourquoi intensifier notre dialogue avec Dieu ou notre générosité à l’égard des autres... mais il reste le jeûne ! En quoi me priver de nourriture ajoute t-il quelque chose à mon amour pour Dieu ? En quoi le Seigneur peut-il être touché si je supprime tel aliment ou tels repas, spécialement le Mercredi des cendres et le Vendredi Saint ?
D’autant plus que nous savons combien la création est bonne. Mieux : elle est un chemin pour aller à Dieu. Une glace à la fraise me nourrit, me réjouit, et je remercie le Créateur de ses dons. Une excursion en montagne avec des amis suscite en moi la gratitude pour notre corps capable d’escalader, pour la beauté du paysage, pour la joie de l’amitié. Posséder des richesses contribue à un certain épanouissement et me permet de faire du bien au plus pauvre dans lequel je vois le visage du Christ. Dans le mariage, grandir en amour humain me permet grandir dans mon amour pour Dieu.
Là où le bât blesse, c’est lorsque je préfère le don plutôt que le Donateur : « tes cadeaux m’intéressent, mais pas Toi ! ». Cela peut se réaliser en repoussant directement Dieu. Cela peut aussi arriver si j’utilise les dons divins dans un esprit contraire à celui voulu par le Seigneur. Changer le mode d’emploi – et donc jeter au panier la loi divine. Or cette loi d’amour nous est donnée par notre Dieu et Père. C’est pourquoi ce rejet prend la valeur d’une offense personnelle. Le péché est donc un éloignement de Dieu pour se tourner vers... une simple créature ! Préférer un bien limité – la 5e part de gâteau au chocolat, tel film qui supprimera vraisemblablement la prière du soir, tel bijou volé... – plutôt que le Bien infini. Mystérieusement, chez celui qui agit de cette manière, la créature prend pour ainsi dire la place de Dieu au lieu d’être un chemin vers le Seigneur. Un bien limité cache l’horizon divin.
Naturellement, il faudrait mettre bien des nuances parce que tous les péchés n’ont pas la même gravité (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique n°1854 et sv).
Que fait alors la pénitence ? Si le péché a consisté à se détourner de Dieu pour désirer des créatures, la conversion et la pénitence emprunteront le chemin inverse : se détourner un peu des créatures pour se tourner vers Dieu. Si nous avons préféré les créatures plutôt que Dieu, nous montrons par notre jeûne que nous aimons plus Dieu que les créatures. Si l’on s’est jadis trop accordé, on accepte de grand cœur de se retrancher aujourd’hui quelque chose. Nos fautes ont été un manque d’amour, et la pénitence sera un surcroit d’amour. La pénitence corporelle permet donc cette dette de justice et d’amour que nous avons envers le Seigneur.
On pourrait ajouter que la pénitence corporelle contribue à notre unification intérieure et nous ouvre à une autre nourriture : celle du Christ dans son Eucharistie.
On pourrait aussi inviter à étendre le jeûne à d’autres domaines comme la télévision ou Internet.
Et que ce Carême contribue à nous faire comprendre que notre plus grand trésor n’est autre que Dieu lui-même !
Rappels de ce que l’Eglise demande pendant le Carême :
- Jeûner le Mercredi des cendres et le Vendredi saint :
Le jeûne consiste à faire un seul repas, sans viande, pendant la journée, avec une légère collation le matin et le soir (dans l’hypothèse où le repas maigre est pris le midi). Sont dispensés de jeûner les personnes de plus de 60 ans, les jeunes de moins de 18 ans accomplis et les femmes enceintes.
- S’abstenir de viande le Mercredi des cendres, le Vendredi saint et tous les vendredis de ce temps.